Les langues parlées au Monténégro : diversité linguistique au cœur des Balkans
Le Monténégro, petit pays situé au sud-est de l’Europe, dans la péninsule balkanique, est bien plus qu’une destination touristique prisée. Il est également le reflet d’une mosaïque culturelle et linguistique fascinante. Dans ce pays de quelque 620 000 habitants, plusieurs langues cohabitent, influencées par l’histoire, les migrations et les identités nationales. Cet article explore en détail les langues parlées au Monténégro, leur statut, leur usage et leur importance sociopolitique.
Le monténégrin : langue officielle de l’État
Depuis la Constitution de 2007, le monténégrin est reconnu comme la langue officielle du Monténégro. Cette reconnaissance fait suite à l’indépendance du pays en 2006. Le monténégrin appartient au groupe des langues slaves du sud, tout comme le serbe, le croate et le bosnien. Il est très proche du serbe, au point que les deux langues sont largement intercompréhensibles.
Ce qui distingue le monténégrin, ce sont principalement des subtilités phonétiques, lexicales et orthographiques. Par exemple, l’introduction officielle des lettres « ś » et « ź » dans l’alphabet latin monténégrin symbolise l’effort d’affirmation d’une identité linguistique propre.
Le serbe : la langue maternelle la plus couramment déclarée
Malgré le statut officiel du monténégrin, le serbe reste la langue la plus parlée dans le pays. Selon les recensements, environ 40 % à 43 % des citoyens déclarent le serbe comme leur langue maternelle, contre environ 37 % à 42 % pour le monténégrin. Ce phénomène s’explique par les liens historiques avec la Serbie, notamment durant la période yougoslave, et par l’identité partagée d’une partie de la population.
Le serbe est enseigné dans les écoles, utilisé dans les médias et largement compris à travers tout le pays. Il partage de nombreuses caractéristiques linguistiques avec le monténégrin, ce qui rend la distinction parfois plus politique que strictement linguistique.
Le bosnien : une langue reconnue et parlée par la minorité bosniaque
Le bosnien est parlé par environ 5 % à 6 % de la population, en particulier dans le nord-est du pays, notamment dans les régions comme Rožaje ou Plav, où vivent des communautés bosniaques importantes. Le bosnien est très similaire au monténégrin et au serbe, mais il contient davantage d’influences turques et arabes, héritées de l’Empire ottoman et de la tradition islamique locale.
Cette langue est enseignée dans certaines écoles, notamment dans les régions à majorité bosniaque, et bénéficie d’une reconnaissance officielle dans les zones à forte concentration bosnienne.
L’albanais : langue de la communauté albanaise
La minorité albanaise représente environ 5 % à 7 % de la population monténégrine, principalement concentrée dans les municipalités d’Ulcinj (Ulqin), Tuzi et Plav. L’albanais est la langue maternelle de cette communauté et est utilisé dans les écoles, les médias locaux, les institutions publiques régionales et les pratiques religieuses.
Dans les zones où la communauté albanaise est majoritaire, l’albanais bénéficie d’un statut de langue officielle locale, ce qui garantit le droit à une éducation et à des services publics dans cette langue.
Le croate : une langue minoritaire reconnue
Le croate est parlé par une minorité vivant principalement le long de la côte adriatique, notamment dans les régions de Kotor et Herceg Novi. Bien que peu nombreux (environ 1 % de la population), les locuteurs du croate ont vu leur langue reconnue comme langue minoritaire, en conformité avec les normes européennes sur les droits linguistiques.
Comme le serbe et le monténégrin, le croate appartient au groupe des langues slaves méridionales et reste très proche linguistiquement des autres langues de la région.
Multilinguisme, politique et éducation
Le système éducatif monténégrin est conçu pour refléter la diversité linguistique du pays. Les élèves peuvent être instruits dans leur langue maternelle, que ce soit en monténégrin, serbe, albanais ou bosnien. Cette politique contribue à préserver les identités linguistiques tout en favorisant la cohésion nationale.
Les débats autour de la langue sont parfois sensibles au Monténégro. Le choix entre monténégrin et serbe peut exprimer des préférences identitaires ou politiques. Néanmoins, la coexistence de ces langues reste pacifique et bien ancrée dans le tissu social.
Le rôle des langues dans l’intégration européenne
En tant que candidat à l’Union européenne, le Monténégro doit garantir les droits des minorités linguistiques. Cette exigence se traduit par la promotion de l’enseignement multilingue, la reconnaissance des langues régionales et la lutte contre toute forme de discrimination linguistique.
Le multilinguisme du Monténégro est donc un atout dans son processus d’intégration européenne, valorisé comme une richesse culturelle plutôt qu’un obstacle à l’unité nationale.
Conclusion
Le Monténégro est un exemple remarquable de coexistence linguistique dans les Balkans. Entre le monténégrin, le serbe, le bosnien, l’albanais et le croate, le pays reflète une diversité culturelle et historique unique. Loin de constituer une source de division, cette richesse linguistique représente une force pour une société en quête d’équilibre entre traditions et modernité.
En comprenant les langues parlées au Monténégro, on découvre un pays profondément enraciné dans l’histoire balkanique, mais résolument tourné vers l’avenir et le respect des identités multiples.